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Portrait d'Alumni - Kamala MARIUS

09 septembre 2021 Portraits
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Chercheure reconnue sur l’Inde, Kamala Marius travaille notamment sur les enjeux urbains et écologiques auxquels est confronté le pays. Initialement intéressée par le monde rural, elle s’est progressivement orientée vers l’urbain, avec la question du genre comme ligne directrice. 

 

J’ai passé mon bac à Dakar au Sénégal avant d’arriver à Strasbourg pour commencer des études de sciences économiques. Par la suite, j’ai basculé vers la géographie avec une spécialisation sur les pays du Sud et notamment le terrain indien, sur lequel porte ma thèse intitulée "Révolution verte et développement rural : le cas de la région de Pondichéry (Inde méridionale)", soutenue en 1991. Il fut intéressant de constater que la Révolution verte[1] a permis dans une certaine mesure l’émergence d’une classe moyenne, avec le revers de la médaille que l’on connait : l’impact écologique dû au triptyque variétés hybrides à hauts rendements / engrais / pesticides. Après ma thèse, je suis partie au Vietnam pour un post-doctorat sur la décollectivisation des terres dans le contexte de libéralisation du pays. En 1996, j’ai été recrutée comme Maîtresse de conférences en géographie à Montpellier, parallèlement rattachée au laboratoire REGARDS (CNRS/IRD) de Bordeaux. Puis, pour mon Habilitation à diriger des recherches[2], j’ai choisi d’étudier les questions indiennes à travers le prisme du genre. Aujourd’hui, j’enseigne à la fois à l’Université Bordeaux Montaigne et à l’Institut d’études politiques (IEP) de Strasbourg et à l’IEP de Bordeaux, tout en étant par ailleurs associée au LAM[3] et à l’Institut Français de Pondichéry.

A quels grands enjeux urbains vos travaux répondent-ils ?

Mes travaux se situent à la croisée des études urbaines, de genre, et de développement. Je me suis intéressée dans un premier temps aux enjeux entourant le monde rural indien : j’ai étudié la migration saisonnière, véritable fléau en Inde, qui s’apparente souvent à de la servitude pour dettes car ces travailleurs agricoles sont envoyés dans des terres lointaines pour rembourser leurs dettes. Dans les années 2000, je me suis penchée sur le phénomène du microcrédit, dont les femmes sont majoritairement bénéficiaires. J’ai démontré que le microcrédit ne permet pas seul aux femmes de sortir de la pauvreté si elles n’ont pas un capital propre à côté. Plus généralement, les questions d’agriculture et d’écologie m’intéressent beaucoup.  

Progressivement, mes recherches ont porté sur les villes indiennes. J’ai travaillé sur la définition de ce qu’est l’urbain en Inde : y est considéré comme urbain un territoire où 75% de la population masculine ne dépend pas de l’agriculture, d’où un taux d’urbanisation très bas, à 31%. En appliquant d’autres critères comme ceux appliqués en France, il est apparu que l’Inde est plus urbaine qu’on ne le pense. J’ai aussi travaillé sur le développement d’une zone franche économique et technologique que l’on appelle "IT corridor" dans la périphérie Sud de Chennai, qui attire de nombreuses entreprises. Enfin, je me suis intéressée aux différentes dynamiques de croissance et de résilience des petites et moyennes villes indiennes, et à l’industrialisation du pays à travers le prisme du genre.

Pourquoi vous êtes-vous orientée vers la recherche ?

J’ai été sensibilisée à la recherche très jeune puisque je viens d’une famille de chercheurs : mon père était géologue-pédologue, ce qui m’a amenée dès l’enfance à beaucoup voyager, notamment en Afrique, au fil de ses travaux. Cette expérience familiale m’a naturellement conduite à m’orienter moi-même vers la recherche.

A quoi ressemble votre quotidien en tant qu'enseignante-chercheure ?

Je suis en perpétuel mouvement entre les universités où j’enseigne et l’Inde, où je me rends plusieurs fois par an pour mes recherches. Mes activités d’enseignement sont assez dispersées puisque je donne des cours de géographie portant essentiellement sur les pays du Sud ou l’Asie. J’ai enseigné tout aussi bien à des élèves de licence de géographie qu’à des élèves de master des IEP de Bordeaux et de Strasbourg. Une autre dimension de mon activité pédagogique passe par l’écriture de manuels sur l’Inde destinés aux étudiants de Sciences Po, de prépas et aux candidats au CAPES.

Quelles sont jusqu'ici vos plus grandes réussites ou fiertés ?

Être reconnue sur les questions de genre me rend assez fière, que ce soit par les médias mais aussi par les étudiants qui me sollicitent sur ces sujets. L’enseignement est une activité qui me procure aussi beaucoup de plaisir, car l’Inde est un pays mal connu et je suis fière de pouvoir apporter un éclairage sur ce pays autour d’enjeux de féminisme ou urbains.

Quels sont vos projets à venir ?

Je travaille actuellement sur un projet de recherche portant sur la diaspora indienne, plus particulièrement la communauté des pondichériens français dont je suis originaire. C’est une communauté que l’on connait peu, qui a dû quitter l’Indochine après la bataille de Dien Bien Phu et qui est aujourd’hui très présente en région parisienne.

 




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